• Apprentissage de la lecture - 3 - Du déchiffrage à la compréhension

    Je continue à partager mes réflexions, suite à la lecture de Du parler au lire.

    Un passage qui m'a particulièrement intéressée est le passage du déchiffrage à la compréhension.
    Cela rejoint en partie le débat sur le choix des méthodes :
    la méthode alphabétique (apprendre le code b+a = ba) et la méthode globale (partir du texte et mémoriser des mots).

    * Quelques éléments de réflexion : 
    On sait que la lecture experte (celle des bons lecteurs ou des adultes) est une lecture globale, car les mots, rencontrés de nombreuses fois, ont été mémorisés. Nous, adultes, n'avons plus besoin de décoder les mots que nous lisons, à part quelques exceptions. C'est vrai chez nous comme chez nos élèves, à force de rencontres avec les mots, la mémorisation se fait automatiquement.

    Petite remarque : Cela ne veut pas dire que nous devons apprendre à nos élèves à reconnaître les mots globalement. C'est à force de rencontres et de décodage, analyse de la composition du mot, que la mémorisation se fera, et non pas seulement en présentant le mot à de nombreuses reprises, comme si on montrait un flashcard à mémoriser, sans offrir les clés pour décoder et encoder ce mot.


    Toutefois il existe certaines différences, certains degrés dans les approches globales :
    - Certains pensent que le simple fait d'avoir un environnement riche en lecture - dans la quantité, dans la qualité, dans la variété des genres, des thèmes abordés, des sujets et des registres - de multiplier les lectures et donc les rencontres avec les mots, suffit à faire mémoriser ces mots.
    - D'autres pensent au contraire qu'il faut exercer les élèves, avec des activités spécifiques qui sont différentes de la lecture courante, qui ressemblent plutôt à reconnaître les mots dans un corpus de mots proches etc...

    Il y a plusieurs façons d'envisager la méthode globale. 
    * Un des postulats est qu'il faut entraîner à reconnaître les mots entiers, en augmentant le nombre de mots connus et que cette mémorisation permettra aux élèves d'accéder directement à la signification du mot.
     Cette approche repose sur la capacité du cerveau à mémoriser un grand nombre de mots, ce qui dépend :
    de la maturité, de la capacité, du niveau de fatigue du cerveau ; de la fréquentation de l'écrit et la rencontre répétée d'un grand nombre de mots.
    Mais ce travail à partir de mots mémorisés présuppose que les élèves aient mémorisé un corpus de mots assez étendu. Il n'est pas réalisable pour des jeunes élèves qui n'ont pas une longue expérience de lecture. Il va d'abord falloir leur faire rencontrer des mots à de nombreuses reprises, pour qu'au fur et à mesure, ils les mémorisent globalement. Et cela limite considérablement les phrases que les élèves seront en mesure de lire. Ainsi les élèves ne seront pas capables de lire des textes de littérature avant un long temps, celui nécessaire pour mémoriser un nombre de mots très conséquent. Ils ne liront que des textes fabriqués pour eux à partir de leur corpus de mots.

    Cette manière de considérer la lecture est enfermante. Cela ne donne aucune clé pour lire des mots inconnus et lire tout. Tout support, tout domaine, tout sujet avec son vocabulaire spécifique (l'exemple le plus parlant est la publication scientifique, mais c'est valable pour tout texte un peu spécialisé dans son domaine). Il est impossible, même pour un lecteur expert, adulte, de mémoriser tous les mots de la langue. Il faut donc apprendre des clés universelles, qui vont permettre de lire TOUS les mots imaginables.
    La capacité à décoder est indispensable pour tous les mots inconnus que l'on rencontre tout au long de sa vie, et principalement pour les plus jeunes qui ont moins de vocabulaire. 
    A moins qu'on ne lui fasse lire que des textes construits POUR LUI, avec uniquement des mots connus dans son corpus. Quelle diversité !

    Le décodage reste valable même chez les lecteurs experts, pour des mots peu ou jamais rencontrés, qui n'ont pas été mis en mémoire, comme des noms scientifiques, noms de médicaments, comme les cite Gad Elmaleh dans ses sketchs (flurbiprofène ou guronzan ), noms propres, mots étrangers... Nous sommes les premiers à retrouver les mêmes difficultés que les enfants apprentis lecteurs, lorsque dans un roman ou une pièce de théâtre apparaît un nom russe (lire Tchékov... insupportable avec les 3 noms illisibles, qu'on ne mémorise pas facilement et surtout interchangeables et) ou scandinave (les meubles Ikéa !!!)
    Il faudra dans ce cas recourir au déchiffrage (découpage) par syllabes ou par lettres. 


    * D'autres utilisent un départ global pour mémoriser des mots, puis procèdent par analyse, soit au niveau de la syllabe, soit au niveau des lettres. Le nombre de mots à mémoriser et des syllabes est également conséquent.

    Ils partent de la mémorisation d'un corpus retreint de mots-supports, contenant toutes les syllabes possibles. Pour déchiffrer un mot nouveau, on procède alors par l'analyse / le découpage de ce mot en syllabes connues puis le recomposition de ce mot à partir des syllabes (mange = man de maman, ge de orange).
    Ce qu'on appelle "méthode mixte" a un départ global, avec la mémorisation d'un corpus de mots dont les mots-outils, puis prend la direction d'une méthode alphabétique, cette fois avec de découpage / l'assemblage des graphèmes, soit par la synthèse (b+a = ba) soit par l'analyse (ba ---> b + a).

    La lecture globale est donc utile comme un objectif final. Selon moi, elle ne constitue pas le départ de l'apprentissage de la lecture mais la finalité.

    A ce propos, Laurence Lentin a une position ambigüe, dans le sens où elle critique l'approche globale et en même temps préconise la recherche de la signification avant d'enseigner le code.

    D'un côté, elle critique la méthode globale et l'approche analytique au niveau de la syllabe qui en découlent :
    Elle évoque l'activité qui consiste à mémoriser des mots entiers (la quantité de mots à mémoriser est à questionner), puis à en déduire des syllabes.
    Puis lors de la découverte d'un mot, à l'analyser, le découper en unités plus petites et chercher à l'intérieur des syllabes.
    Elle prend l'exemple du mot "logement" qui peut être découpé puis reconstitué à partir des syllabes des mots "horloge" et "garnement" ou bien, "loto" et "sagement".
    L'accès au sens est bien éloignée et difficile à obtenir. Cela demande un effort pour se détacher du sens des mots-supports. Il faut écarter les significations (horloge / garnement) et ne garder que la matériau oral, puis reformer le mot dans sa tête. On part de ce nouveau mot, de ce nouvel assemblage de syllabes (loge + ment) il faut en le prononçant ou subvocalisant trouver la signification de ce mot.

    D'un autre côté, elle critique également l'enseignement du code alphabétique comme apprentissage premier, ou préalable à la lecture :
    Elle dit à plusieurs reprises que l'apprentissage du code (déchiffrage) n'est pas premier, mais vient en deuxième position dans l'apprentissage de la lecture.
    Elle explique que le lecteur expert (ou l'élève bon lecteur) ne lit pas le mot jusqu'au bout. Il est d'abord à la recherche de sens, il est d'abord dans une position d'anticipation et de suppositions par rapport au texte qu'il vient de lire.
    Cela rejoint et complète d'une manière inattendue ce que j'avais observé dans ma classe et partagé sur ce blog.

    Voilà ce que j'écrivais :
    "- Deuxièmement (et là c'est plus "grave") cela peut faire croire aux élèves que lire, c'est essayer de deviner l'histoire. La fameuse "devinette" qu'on observe chez nos élèves !"

    Et bien aujourd'hui je reviens sur ma conception de l'époque. Oui, quand on apprend à lire, il est évident que l'enfant doit chercher à comprendre l'histoire. Et pour cela il va utiliser deux techniques simultanées et surtout faire un va et vient entre ces deux méthodes qui se complètent :
         1- décoder le mot (un travail fatiguant qu'on peut associer aux jeux avec des codages de symboles qu'on faisant quand nous étions petit : le rond = o, le carré = a, la spirale = l, le triangle = e, le bâton = l, le coeur = r, l'étoile = é... allez, essayez de trouver la phrase.)
         2- comprendre, chercher le sens, parfois donc essayer de deviner en anticipant ce que pourrait vouloir dire la phrase, mais bien sûr en se basant sur les premières lettres qu'on a trouvées par le décodage.

    Par exemple, très récemment, j'ai fait un jeu d'escape game.
    Grâce au code, je devais trouver une adresse.
    J'ai commencé à décoder : n e u ... j'en ai déduit neuf, parce que je devais trouver le numéro de la rue.
    Ensuite r u (j'en ai déduit rue et je n'ai pas cherché à vérifier le e)
    Puis r o g e r s a l e n (j'ai vite trouvé qu'il s'agissait de la rue Roger Salengro).

    Comment est-ce que je m'y suis prise ?
    Comment ? J'ai commencé par décoder, le début des mots.
    Puis j'ai deviné avec les éléments que j'avais.
    Pourquoi ai-je trouvé ces mots facilement ? Pourquoi je n'ai pas eu besoin de tout décoder jusqu'au bout ?
    Parce que je connaissais le nom "Roger Salengro", tout comme je savais que je cherchais une adresse, donc un numéro et une rue.
    (C'était la bonne réponse, j'ai gagné l'escape game !^^, mais surtout ça m'a permis d'avoir cette petite réflexion sur la lecture^^)

    Le mot "deviner" est intéressant car il suppose que cette devinette se fait au hasard.
    Toute la nuance est là.
    Non, deviner (quand on lit) ne se fait pas au hasard, mais se base sur le décodage.
    En effet, les élèves doivent développer l'envie et les stratégies pour comprendre ce qui est écrit.
    Pour cela, c'est là que le décodage intervient, ils vont bien entendu s'appuyer sur le texte, les mots, les lettres, qui eux sont immuables.

    Une petite parenthèse sur la présence de certaines images qui "donnent la réponse" en représentant exactement ce qui est écrit dans la phrase. Celles-ci, en montrant, en racontant par le dessin, ce que l'élève aurait dû / pu découvrir en lisant, lui fournissent une aide trop grande, une réponse trop rapide bien avant que l'élève se questionne, entre dans la lecture, fasse l'effort de procéder au décodage.
    Bien sûr il comprend, mais cela, ce n'est pas lire (à moins qu'il ne "lise" que des BD ou albums sans parole). Comment fera-t-il quand il n'y aura plus d'image ?
    Ce n'est pas le cas de toutes les images, certains soutiennent également les efforts des élèves pour lire, ou fournissent des éléments pour comprendre l'implicite, les relations de cause à effet. 

    Le lecteur est donc à la recherche de sens, il essaie de deviner et de comprendre, mais il s'appuie sur le matériau qu'il a compris par le décodage.
    Pour y accéder, il commence à lire le premier mot. Il s'appuie bien sur une activité de décodage, qui reste le premier accès au mot.
     
    Pour autant, le bon lecteur ne déchiffre pas le mot jusqu'au bout (à la condition que ce soit un mot connu).
    Comme je l'ai décrit, il s'appuie sur le début du mot pour anticiper ce qu'il va lire, émettre des hypothèses.

    Regarde, nous avons lu "Le chat mange la sss... sss..."
    Que peut manger le chat à ton avis ?
    Il peut et doit à ce moment anticiper la lecture (c'est à dire prévoir ce qu'il va découvrir après) et émettre des hypothèses.
    Pour cela, il doit avoir recours à la signification de la phrases ET au texte lui-même, ici la lettre S.
    Il faut absolument commencer par s'appuyer sur la première lettre. En effet si on enseigne à nos élèves de faire des hypothèses sans s'appuyer sur des éléments concrets du texte, ils vont développer l'habitude de "deviner".

    *Un élève qui ne s'appuie pas sur le texte, mais que sur le sens :
    Si on ne s'appuie pas sur les lettres, on laisse l'enfant partir dans son imaginaire, dans un champ de possibilités très large, dans des hypothèses très éloignées de la réalité (du lait, un oiseau, du jambon, on peut y passer des heures... la s
    eule solution efficace reste de se confronter au texte et de lire véritalement).

    * Un élève qui n'a pas recours au sens de ce qu'il lit : 
    On a parfois des élèves qui font des hypothèses et d'après nous, sortent des mots comme ça, de nulle part, sans tenir compte du sens.

    sssss.... soustraction, superman.

    Un élève dans ce cas peut tout à fait se contenter de :
    Le chat mange la soustraction.
     (oh oui tiens, la maîtresse n'arrête pas de répéter ce mot en ce moment, ça doit être important).

    ou
    Le chat mange la spectacle. (si en plus de ne pas s'appuyer sur le sens, il ne s'appuie pas sur la marque grammaticale du féminin LA ou ne connait pas le genre de spectacle.)

    Ils se contentent de ces phrases sans le moins du monde être gênés par le manque de sens de ce qu'ils viennent de lire / dire. Il faut dans ce cas les interroger sur la compréhension de ce qu'ils lisent: est-ce que ça veut dire quelque chose ? Est-ce qu'ils imaginent, voient les personnages, se font le film de l'histoire dans leur tête ?


    A ce stade, on a donc des hypothèses, parfois nombreuses, sous réserve que ça soit possible en fonction du sens. 
    sssss comme... souris ? sardine ? salade ? soupe ?
    L'éventail des possibilités se réduit avec quelques réflexions :
    Ce sont des choses qui se mangent. Mais qu'un chat peut manger --> soupe, salade, c'est peu probable...
    Mais souvent si on est sûr de la probabilité de notre solution, une seule hypothèse : souris...

    Ce sont souvent des mots qui appartiennent au contexte de la lecture (chat et souris, ça va souvent ensemble) ou au contexte de la classe, par exemple des mots rencontrés récemment (Tiens, on a lu un livre où la sorcière Kroquela fait de la soupe ! La soupe ça se mange, ça peut marcher).

    Allez, soyez honnête, avouez que vous aussi, vous avez déjà anticipé et émis l'hypothèse que la phrase serait "Le chat mange une souris" alors que jamais le mot "souris" n'était écrit. J'aurais tout aussi bien pu écrire "Le chat mange une sardine"... héhé ! Tout le monde serait tombé dans le panneau.

    C'est à ce moment qu'intervient la deuxième étape, celle de la vérification, par le déchiffrage réel du mot.
    Ici, la maîtrise du code alphabétique devient indispensable pour réellement décoder le mot, vérifier son hypothèse. Vérifier, c'est à dire se confronter à la réalité immuable du texte, et confirmer (j'avais bon) ou infirmer (je m'étais trompé) et donc renoncer à son hypothèse.
    L'élève va donc regarder les lettres suivantes :
    sa...
    Et non, "sa" ne peut pas être le début de "souris". Je dois donc renoncer à mon hypothèse, et éventuellement en chercher d'autres. Sa : salade, sardine.

    Un élève qui ne va pas procéder à la vérification de son hypothèse va essayer de "deviner" ou dire des réponses

    "au hasard" et rester sur son hypothèse, même si elle n'a pas de sens.
    C'est comme ça que des enfants vont lire "souris" au lieu de "sardine".
    Mais aussi "chat" alors qu'il est écrit "chasse" ou "maman" pour "mamie".


    Cette activité mentale d'anticiper, faire des hypothèses, PUIS la vérifier ensuite, n'est possible QUE si les élèves ont des hypothèses lors de la lecture.
    Or, ce n'est pas le pas de tous les élèves.
    En particulier des élèves peu à l'aise à l'oral, qui ont peu de connaissances (expérience du vécu, connaissance du monde ou intertextualité) ou ne font pas le lien, ne font pas l'opération mentale d'aller chercher dans leur vécu et leurs connaissances du monde qu'un chat mange des souris, ou que, lorsqu'on lit un conte, dans une forêt il y a souvent un loup. 
    Et encore moins pour des élèves non francophones.
    C'est pourquoi la capacité à anticiper, faire des hypothèses et s'appuyer ensuite sur le texte pour vérifier, est à entraîner chez les élèves, tant à l'échelle du texte (que va-t-il se passer après ?) qu'à l'échelle d'un mot dans la phrase (sardine dans "Le chat mange la sardine.") 

    Pour des élèves qui font peu d'hypothèses mais aussi pour des mots moins courants et connus des élèves, où pour des situations plus inédites que "Le chat mange une sardine", le seul moyen est de décoder ce qui est réellement écrit, donc s'appuyer sur les lettres.

    Quand on arrive à des phrases que les élèves ne peuvent pas deviner ou avec des mots inconnus, tout à coup, cette stratégie ne fonctionne plus et les enfants sont perdus, se sentent bêtes de ne pas trouver "la réponse" même en cherchant bien dans leur tête.
    Je vous livre ici la situation d'hier encore dans ma classe :
    Mes élèves super motivés pour déchiffrer ce qui se passe quand, nos 3 amis des "Musiciens de Brême" arrivent à une maison dans la forêt et voient pas la fenêtre... trois... b... b...
    émission d'hypothèses (bébé ? bateaux ?)
    br... br... (brebis ?)
    Allez je vous le dis, c'était "trois brigands" ! 
    L'élève qui lisait à ce moment là a eu bien du mal à le déchiffrer tout seul. Il s'obstinait un peu, au début, à vouloir deviner, pendant quelques minutes d'essais infructueux où les mots ne voulaient rien dire.
    C'est le seul décodage qui lui a livré la réponse. Toutefois, comme cet élève a des difficultés à décoder rapidement, il s'est habitué à utiliser la stratégie de la devinette et a bien du mal à vérifier par la suite s'il avait raison. Avec certains élèves, il faut donc déconstruire cette habitude et les obliger à se confronter à la réalité du texte.
    Comme la maîtresse disait "N'essaye pas de deviner, lis les lettres" et que personne ne lui a soufflé la réponse (les autres élèves voyant les gros yeux de la maîtresse qui disaient "Chut on ne dis pas la réponse !"), il a déchiffré lettre après lettre, syllabe par syllabe, le BR difficile, le G qui fait "gu" et le mariage "AN".
    Et pour finir, il a même remarqué le D et S muets, tout fier.

    Bien sûr, s'aider du contexte de l'histoire, c'est une gymnastique de l'esprit indispensable, car quand on lit, l'objectif est de comprendre.
    Je ne saurais pas dire qui (de la poule ou de l'oeuf...) du décodage ou de la recherche de signification, vient avant l'autre dans l'acte de lire et dans le passage du déchiffrage à la compréhension.
    Je pense que c'est un va et vient très rapide.

    Dans tous les cas, le début de l'acte de lire est le décodage.
    On est confronté aux premières lettres du mot, pour orienter notre recherche de sens.
    Il est important si on procède seulement par décodage de vérifier si le mot qu'on a lu est "possible", s'il veut dire quelque chose, s'il a du sens dans son contexte. C'est une vérification après avoir décodé le mot (pour voir si l'on ne s'est pas trompé sur une lettre, un son, un accent, au même titre qu'en maths, quand on fait la preuve d'une soustraction).
    Mais il est important de s'appuyer sur le sens dès le départ, car cela permet d'être au coeur même de la lecture, avec pour préoccupation principale de comprendre ce que raconte l'histoire, ce que veulent dire les mots.
    Et émettre rapidement des hypothèses permet également de n'avoir qu'à vérifier, ce qui est moins coûteux que de tout décoder. 
    Et au final, vérifier par le décodage que le mot correspond bien jusqu'à la fin à l'hypothèse qu'on avait formulé, est le seul moyen de savoir ce qui est vraiment écrit.

    De plus, l'écrit contient des marques grammaticales, il fournit des indices qui aident à comprendre le texte.
    (Cet accent nous indique que le verbe est un participe passé.
    Cette chaîne de -S nous indique quels mots vont ensemble et forment un groupe.)

    ***


    Toutefois je reste très dubitative sur les activités de "découverte de texte" que l'on m'a enseignées à l'IUFM, qui pour moi procèdent à l'envers, et sur de faux arguments.

    Cela se traduit en classe par des activités de "découverte collective du texte" où les élèves s'exercent à chercher les mots que l'on connait, ou les syllabes que l'on reconnait. On les entraîne donc à survoler tout le paragraphe d'abord (mais sans LIRE) et à surligner les mots que l'on a reconnus.
    C'est ce que des formateurs m'ont appris à l'IUFM il y a 7 ans ! Est-ce que c'est ça, lire ?
    Non ! Désolée, quand vous et moi, adultes, nous lisons un texte, on ne prend pas notre petit surligneur et on ne cherche pas D'ABORD dans tout le texte les mots qu'on connait, avant d'enfin commencer à lire !
    On part du début d'une phrase, à gauche, et on lit au fil de la ligne, au fil de la phrase, pour comprendre.
    Lire c'est partir du début et regarder les lettres, les syllabes, dans l'ordre, les combiner en mots pour les comprendre.

    Ce sont des stratagèmes pour rassurer l'enfant, tenter de construire sa confiance en ses capacités, en lui disant "Tu vois, dans ce texte qui fait peur parce qu'il est long, tu sais déjà lire tous ces mots !"
    Ah, on a surligné 10 mots dans le texte, la belle affaire ! Est-ce qu'on a compris quelque chose ? Non.
    (Tout ça en prenant 10 minutes sur le temps de lecture et en perdant au passage les quelques Achille, Enzo et Shirel qui déjà n'ont pas réussi à trouver les 10 mots que les copains les plus performants ont trouvés bien avant eux).

    Et si on ne décode pas les autres mots qui restent inconnus, qui ne sont pas dans les petits tiroirs de notre mémoire, ça nous fait une belle jambe tiens, de connaître 10 mots !
    ça ne nous avance pas beaucoup car il reste les mots autres mots à décoder et on ne comprend pas pour autant l'histoire.


    Ensuite, ça donne l'impression aux enfants de CP qu'il faut essayer de deviner le mot seulement à partir du contexte sans s'appuyer du tout sur les lettres, sur les mots.
    Parce que quand on est venu au CP pour apprendre à lire et qu'on nous demande de comprendre l'histoire, on essaye vraiment ! On fait des efforts ! On cherche et on réfléchit fort !
    On écoute bien la maîtresse qui demande de se creuser un peu la cervelle pour comprendre l'histoire.


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